Parler de la démence

An elderly person outdoors

Comment les mots utilisés pour décrire l’expérience de la démence peuvent conduire à une approche de la sécurité et des soins plus centrée sur la personne

La force réside dans les mots. Les mots que nous choisissons pour nous décrire, intentionnellement ou non, peuvent influencer la façon dont les autres nous comprennent et interagissent avec nous. C’est particulièrement vrai dans le domaine des soins de santé, où de nombreuses personnes ne saisissent pas les complexités et les nuances de certaines affections avant d’être elles-mêmes confrontées à un diagnostic.

Le langage dans le secteur des soins de santé évolue, un nombre croissant de professionnels de la santé prenant conscience de l’influence des mots sur les soins. Les termes autrefois utilisés pour décrire les troubles du développement et les maladies mentales sont aujourd’hui considérés à juste titre comme des insultes désobligeantes. Les porte-paroles des patients atteints du cancer s’éloignent des métaphores de « combat » qui font injustement peser la responsabilité de la « lutte » contre la maladie sur les personnes en cours de traitement. Il en va de même pour les personnes atteintes de démence, qui sont souvent confrontées à une stigmatisation considérable lorsque les autres parlent de leur maladie d’une manière qui ne reflète pas leur expérience réelle.

En tant qu’organisme travaillant à l’intersection des soins de santé et de la sécurité publique, MedicAlert prend soin d’utiliser le langage le plus actuel possible pour s’assurer qu’elle peut défendre les intérêts de ses abonnés et les faire se sentir à l’aise et respectés lorsqu’ils utilisent des services tels que le programme Retrouvés sains et saufs.

« Nous voulons redonner le pouvoir aux personnes, et non les démoraliser ou les stigmatiser », déclare Stefanie Tan, vice-présidente associée de MedicAlert, responsable des programmes de recherche. « Il s’agit d’un service qui leur permettra de rester en sécurité. Cela ne devrait pas donner une connotation négative au diagnostic en lui-même"

Se concentrer sur la personne, pas sur le diagnostic

Les mises à jour du langage dans le domaine des soins aux personnes atteintes de démence sont principalement axées sur ce que l’on appelle les soins « centrés sur la personne » — lespersonnes traitées sont considérées comme des individus uniques et non pas uniquement sous l’angle de leur diagnostic. Le changement de langage le plus important consiste à éviter d’appeler la personne en question « patient dément » et à la remplacer par « personne atteint de démence ». Pour les personnes extérieures, cette désignation peut sembler insignifiante, mais pour les personnes concernées, la nouvelle formulation peut leur redonner un sentiment de dignité et d’humanité.

« De nombreuses affections de fin de vie, comme la démence, l’incontinence et la fragilité, sont toutes des affections stigmatisantes qui donnent automatiquement à l’individu une image parfois très péjorative », explique le Dr Adrian Wagg, titulaire d’une chaire sur le vieillissement en bonne santé, directeur et professeur à la division de médecine gériatrique de l’université de l’Alberta. « Il s’agit de se rendre compte que les personnes âgées ne sont pas toutes les mêmes. Ce sont des personnes qui ont des origines, une éducation, des perspectives et des croyances très différentes et qui doivent être traitées comme des individus. »

Même les personnes âgées qui ne présentent pas de symptômes de démence rejettent les qualificatifs d’« aînés » ou de « gériatrique », qui mettent davantage l’accent sur leur âge que sur leurs qualités personnelles. Parmi les autres exemples de ces changements de langage, citons le passage d’« aidant » à « partenaire en matière de soins médicaux » en référence aux membres de la famille qui s’occupent de leurs proches, afin de centrer la personne atteinte de démence sur son rôle de participant à ses propres soins. D’une manière plus générale, le langage centré sur la personne peut consister à décrire les comportements de la manière la plus précise possible plutôt que de qualifier une personne d’« agressive » ou de « difficile » ou d’utiliser des termes stigmatisants tels que « fardeau » ou « victime ».

Nouveau langage en action

L’objectif de cette reformulation est qu’en changeant collectivement le langage autour des soins aux personnes présentant une démence, une approche centrée sur la personne émergera intuitivement. Les dirigeants de MedicAlert consultent activement les professionnels de la santé et les groupes de défense des personnes présentant une démence afin de s’assurer que le personnel utilise le langage le plus actuel lorsqu’il s’adresse aux abonnés ou aux partenaires en matière de soins médicaux par téléphone. Le personnel est formé pour aborder les besoinsindividuels et les problèmes médicaux de chaque abonné plutôt que d’être limité par des suppositions sur ce que signifie un diagnostic de démence.

« Nous ne les enfermons pas dans une affection. Ce qui compte c’est la personne », explique Stéphanie Tan. « Chacun est confronté à un ensemble unique de circonstances. Notre travail consiste à essayer de collecter les renseignements afin qu’en cas d’urgence, nous soyons en mesure de distiller et de transmettre ces renseignements uniques aux premiers intervenants pour qu’ils ramènent la personne chez elle en toute sécurité ».

Le pouvoir des mots

En plus d’utiliser un langage actualisé pour mieux refléter les meilleures pratiques actuelles en matière de soins aux personnes atteintes de démence, MedicAlert s’assure que les abonnés atteints de démence sont à l’aise avec le langage utilisé pour décrire leurs problèmes de santé, même si cela implique d’utiliser des mots qui ne correspondent pas à leur diagnostic officiel. Par exemple, si un abonné n’est pas encore à l’aise pour s’identifier comme une personne atteinte de démence et préfère dire qu’il présente un certain degré de « perte de mémoire », ces distinctions peuvent être faites sur les profils médicaux. Chaque personne a des besoins différents et le fait de les traiter comme des individus plutôt que comme un diagnostic peut grandement contribuer à la qualité de vie.

« Ces vieilles étiquettes dépersonnalisent les gens et éliminent l’individu de l’équation », explique M. Wagg. « Ils deviennent leur diagnostic. »